A peine ombre, un film de Nazim DJEMAI

Scritto da | Settembre 4, 2014 | Senza categoria | Nessun Commento

Allumer un mégot de son briquet vide

Un plan de neige surgit au milieu des feuilles d’automne, comme si le temps hoquetait. Le son saute lors des raccords, disant l’aspérité d’un récit qui se cherche. Un regard, celui du réalisateur, s’attache à décrire ce et ceux qui l’entourent.

Ce qui l’entoure : La Borde, vaste domaine où Felix Guattari et Gérard Oury ont mis en chantier dans les années 1950 le courant de la « psychothérapie institutionnelle ». Une philosophie : contenir sans enfermer, marquer l’espace de repères pour que les pensionnaires s’y orientent.

Ceux qui l’entourent : des esprits et des corps qui cherchent à négocier avec la maladie. Le regard d’une femme se baisse, ses mains pendantes semblent désynchronisées, mais finissent par s’envoler et se réunir. Une autre décortique brillamment la théorie lacanienne en se voûtant de plus en plus au-dessus de son bureau. Thérapeute ou malade ? Les attitudes, les paroles montrent surtout le partage qu’induit une communauté de vie.

Jusqu’au geste du réalisateur, l’un d’entre eux. Ailleurs, on aurait flouté le visage des « fous » – afin de les protéger. Au contraire, Nazim Djemaï filme avec insistance, les portraits succèdent aux portraits. Il pose un cadre unique pour tous : choisir son lieu, livrer son expérience ou se taire. Faute de parvenir à composer une image d’eux-mêmes, certains pensionnaires semblent à nu devant l’objectif, silencieux, importunés. Un homme cherche à allumer son mégot de son briquet vide.  « C’est fini ? » dit-il, de plus en plus gêné par la caméra, qui continue à le fixer imperturbablement. « C’est fini ? » Il se lève, sort du cadre. Complexité d’un regard qui veut rendre les « fous » au monde, restituer leur existence, au-delà des limites rassurantes du lieu.

Gaëlle Rilliard

Spaesamenti/Dépaysements staff FR

Scritto da Spaesamenti/Dépaysements staff FR

Scrivi un Commento